Noël au balcon ... point sur les cours de l'énergie avec Fabrice Guez
Fabrice GUEZ
Consultant
Date : 18 janvier 2023

Noël au balcon …

 

Après une période complétement folle qui avait vu les prix du pétrole WTI toucher des prix négatifs, les marchés de l’énergie ont commencé à se tendre en 2021 en raison de divers facteurs, notamment le rebond économique extraordinairement rapide qui a suivi la pandémie.

 

La situation s’est dramatiquement transformée en une véritable crise énergétique mondiale après l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022.

 

Le prix du gaz naturel a atteint des sommets et, par conséquent, celui de l’électricité sur certains marchés. Les prix du pétrole ont atteint leur plus haut niveau depuis 2008.

 

La hausse des prix de l’énergie a contribué à une inflation douloureusement élevée, poussé des familles dans la pauvreté, contraint certaines usines à réduire leur production, voire à fermer, et ralenti la croissance économique au point que certains pays se dirigent vers une grave récession.

 

De nombreuses économies émergentes voient leurs factures d’importation d’énergie augmenter fortement et connaissent des pénuries de carburant.

 

Et l’Europe, dont l’approvisionnement en gaz est particulièrement vulnérable en raison de sa dépendance historique vis-à-vis de la Russie, aurait donc pu être confrontée à un rationnement du gaz cet hiver.

 

Heureusement, en janvier 2023 l’Europe a été sauvée par des records de température dans toute la péninsule et les prix de l’énergie se sont effondrés : le prix du gaz naturel est tombé à des niveaux qui n’avaient pas été vus avant la guerre en Ukraine.

 

Pour le continent qui est sur le point de connaître son premier hiver sans gaz russe, cet hiver anormalement doux est providentiel. Mais toute aggravation des températures pourrait entraîner des prix encore plus élevés, des pénuries de gaz et une récession majeure.

 

Ainsi, aujourd’hui, le système énergétique européen est confronté à une crise sans précédent et les marchés de l’énergie ont connu une année de montagnes russes.

 

En réponse à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les pays occidentaux ont imposé des sanctions financières à la Russie et ont mis un embargo sur ses exportations de pétrole. En représailles, la Russie a réduit ses livraisons de gaz à l’Europe.

 

Les grands importateurs, comme l’Allemagne, ont dû réduire leur consommation d’énergie et s’approvisionner ailleurs. Les pays à revenu faible ou intermédiaire ont eu du mal à accéder à une énergie abordable. L’approvisionnement en gaz russe – essentiel pour le chauffage, l’industrie et l’électricité – a été réduit de plus de 80 % cette année.

 

Les prix de gros de l’électricité et du gaz ont été multipliés par 15 depuis Février 2021, avec de graves conséquences pour les ménages et les entreprises.

 

 

Que faire pour les gouvernements européens ?

Les gouvernements européens ont commencé à mettre en œuvre une série de réponses politiques.

 

a) La première a visé à atténuer l’impact de la hausse des coûts sur les consommateurs et les entreprises. Il s’agit notamment de plafonner les prix de détail, de réglementer les tarifs, de mettre en place des programmes de soutien pour les entreprises à forte consommation d’énergie et d’apporter des liquidités ou des capitaux aux entreprises énergétiques, voire de les nationaliser.

 

 

b) Une autre catégorie de mesures vise à stabiliser et à réduire les prix de gros et à assurer la sécurité énergétique. Il s’agit de politiques visant à encourager les économies d’énergie et à accroître l’offre, mais aussi à plafonner les coûts énergétiques, en particulier les prix de gros du gaz.

 

 

« Demand Destruction »

L’augmentation des prix de gros de l’électricité reflète la flambée des prix du gaz naturel et les insuffisances de la production nucléaire qui ont dû être complétées par l’électricité produite par des centrales plus coûteuses. Cela signifie d’ailleurs que la plupart des producteurs d’électricité à faible coût réalisent des bénéfices extrêmement élevés.

 

Dans certains cas, l’augmentation de la production d’électricité à partir du charbon et du gaz n’a pas suffi à répondre à la demande. En conséquence, les prix ont grimpé si haut que certains clients ont complètement cessé de consommer, un phénomène connu sous le nom de « demand destruction ».

 

Les marchés européens de l’énergie se sont resserrés au point que de petites variations de l’offre ont des effets gigantesques sur les prix.

 

 

Une pilule empoisonnée ?

Le problème principal de ces solutions réside dans le fait que les subventions et le plafonnement des prix pourraient aggraver le problème sous-jacent en
augmentant mécaniquement la demande. En effet, subventionner la consommation d’énergie peut profiter aux consommateurs d’un pays et augmenterait aussi la consommation, ce qui entraînerait une hausse des prix de gros dans toute l’Union européenne et nuirait aux consommateurs des autres pays qui n’ont pas adopté des mesures similaires.

 

Ces mesures ne peuvent donc être que provisoire car pouvant apporter des problèmes plus contraignants que les solutions apportées.

 

Les propositions de plafonnement des prix sont de deux ordres : limiter le prix des importations de gaz et plafonner les prix de gros au sein de l’Union européenne.

 

En juin 2022, l’Espagne et le Portugal ont adopté un « cap ibérique » qui plafonne le prix du gaz utilisé pour produire de l’électricité. Cela limite efficacement le coût de l’électricité, car les centrales à gaz déterminent généralement le prix marginal.

 

Cette politique a permis de contenir les coûts de gros de l’électricité en Espagne et au Portugal, mais elle a également incité les producteurs ibériques à brûler davantage de gaz pour produire de l’électricité.

 

D’autre part, imposer un plafond uniquement au gaz russe, afin de réduire les profits de ce pays tout en diminuant les coûts pour l’Europe n’est pas sans risque.

 

De fait, l’approche qui répond le mieux aux problèmes est un effort coordonné des gouvernements pour réduire la demande d’énergie et augmenter l’offre tout en protégeant les consommateurs vulnérables.

Pour aller plus loin, voici les formations sur le thème :

Introduction aux marchés des matières premières
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